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85 coups de klaxon

  • R&B
  • 24 mars 2016
  • 3 min de lecture

85, comme le nombre de coups de klaxon entendus la nuit dernière.

Le klaxon, la Pomme de discorde venue nuire à notre relation jusqu’alors idyllique avec la tendre Morphée. Et autant dire, que cette pomme, les Adam locaux l’ont mordue à pleines dents. Les salops !


Pour les occidentaux lambda que nous sommes, le klaxon est rapidement catégorisé comme un mauvais réflexe, une coutume étrange, un empêcheur de tourner rond. La politique a son Mélenchon, notre tranquillité a son klaxon. Et à coté, le premier cité passerait presque pour un mec discret.


Pour nos hôtes par contre, le klaxon est un outil de travail, une seconde nature, un véritable moyen d’expression. Mode d’emploi ci-dessous.


Vous souhaitez avertir quelqu’un de votre arrivée imminente à un rendez-vous (avec une demi-heure de retard bien sûr, sinon c’est pas réglo) ? Détente. Rien ne sert de descendre de votre 4 roues. Appuyez-donc. Votre ami se fait attendre ? Redoublez donc d’efforts. Frénétiquement. Et en rythme s’il vous plait.

Vous avez une connaissance somme toute relative du code de la route ? N’ayez crainte! Une invective brève à chaque croisement suffit à prévenir que vous comptez vous engager. Peu importe la couleur du feu.

Vous travaillez dans le commerce de vitamines ? Votre taf, c’est vendre des papayes, des mandarines et des bananes (les meilleures du monde cela dit, en passant) ? Assurez-vous que tous, sans exception, consomment 5 fruits et légumes par jour : pressionnez le klaxon afin de rappeler à chacun son droit de manger équilibré.

Votre rôle est de s’assurer qu’aucune des maisons du quartier ne manque d’eau ? Faites leur part de la présence perpétuelle du gros camion citerne que vous conduisez, de 5h30 du matin à 19h du soir, 6 jours sur 7, en pressant votre plus beau jouet toutes les 2 secondes et demi. Par la même occasion, vous deviendrez à n’en pas douter le joueur-buzzer le plus rapide de l’histoire de Questions pour un champion ? N’en déplaise à Julien Lepers.


Aussi, pour notre plus grand bonheur, cet amour inconditionnel des chauffeurs locaux pour leur joujou donne parfois lieu à des situations étonnantes. Par exemple, si vous n’avez jamais assisté à un dialogue de morse sonore entre deux conducteurs de colectivo (moyen de transport propre à l’Amérique du Sud, sang-mêlé entre le taxi et le bus), c’est que vous n’êtes jamais allés en terre inca. Autre exemple, la traduction du fameux dicton français : « Et mademoiselle t’es charmante, ça te dirait une glace à la menthe ? ». En péruvien, il se chante uniquement. Une sonate de 0 à 10 coups de klaxon. 11 si vous croisez la femme de votre vie.


Ce concert sempiternel d’exclamations automobiles permet d’ouvrir un débat beaucoup plus vaste : la relation que les péruviens entretiennent avec le bruit. En effet, ici, le silence, à défaut d’être d’or, dort paisiblement depuis des dizaines d’années. Mais finalement : là où il y a du bruit, n’est-ce pas là où il y a de la vie ? Etre réveillé tous les matins, aux aurores, non pas par le volume 7 du Requiem en Ré mineur de Steve Jobs, mais par des travailleurs déterminés allant gagner « notre pain de ce jour », n’est-ce pas la preuve que certains ont mieux assimilé que vous la maxime : « Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt » ? Nous croyons bien que si…


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